Le Film du Mois de Juillet 2019 : Un Havre de Paix
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Ce mois-ci, il s’agit d’Un Havre de Paix, le premier long-métrage du réalisateur israélien Yona Rozenkier sorti le 12 juin 2019.
Genre : Guerre, Drame – Durée : 91 minutes - Réalisateur : Samuel Bigaoui
Synopsis : Trois frères se retrouvent pour enterrer leur père dans le kibboutz de leur enfance. Avishaï, le plus jeune, doit partir deux jours plus tard à la frontière libanaise où un nouveau conflit vient d’éclater. Il sollicite les conseils de ses frères qui ont tous deux été soldats. Itaï souhaite endurcir le jeune homme tandis que Yoav n’a qu’une idée en tête : l’empêcher de partir. Dans ce kibboutz hors du temps, le testament du père va réveiller les blessures secrètes et les souvenirs d’enfance...
Tentative de critique : Le cinéma est friand de réunions de famille, avec leur lot d’engueulades, de mises au point… et d’émotion également. Dans Un havre de paix, plusieurs éléments rendent encore plus explosives ces retrouvailles de trois frères (Itai, Yoav, Avishai) venus enterrer leur père. Nous sommes en 2006, dans un kibboutz près de la frontière libanaise, en proie donc avec la menace quotidienne de se prendre une roquette sur la figure… Et puis Avishai, le benjamin, doit partir à la guerre dans quelques jours – ce qu’on déjà connu ses deux grands frères. La tension est palpable, la peur aussi malgré la véritable préparation militaire dirigée par Itai. D’autant plus que Yoav avait fui le kibboutz pour Tel-Aviv, laissant à ses frères et à sa mère le soin de s’occuper d’un père moribond.
Un havre de paix n’est pas un film sur la guerre, ni directement sur Israël. Le film dénonce de manière plus universelle une société de la virilité qui nie la sensibilité, les failles et les traumatismes au profit d’une apologie de la force brute et du courage. Dans le contexte spécifiquement israélien, cette virilité exacerbée, dénuée de toute psychologie, trouve dans l’armée et dans la guerre sa meilleure expression. Il est question de rites de passage : petits, les enfants devaient braver les vagues et plonger dans une grotte sous-marine ; grands, c’est l’engagement dans Tsahal et le baptême du feu. Cet ode à la virilité archaïque se poursuit de génération en génération, avec l’aval passif des mères, et si on ne s’y soumet pas, on passe immédiatement pour un lâche. Avishai va devoir choisir : soit suivre Itai, le fils fidèle qui cherche à l’endurcir et aller se battre, soit tout abandonner et suivre Yoav qui s’est rebellé et a fui.
Tourné dans le kibboutz même où les frères Rozenkiel ont vécu, Un havre de paix est un film de famille – ce qui lui donne un supplément de force et de sincérité.
Yona Rozenkier est né en 1981 dans le kibboutz Yehiam en Israël. Il y a grandi et y a travaillé comme fermier, avant d’étudier le cinéma à l’université de Tel Aviv. Il a réalisé plusieurs courts-métrages multiprimés dans les festivals internationaux, dont BUG ON A HELMET en 2011 et RAZ AND RADJA en 2012. Il a également participé au projet WATER, programme de courts-métrages réalisés par des cinéastes israéliens et palestiniens dans la volonté de repenser les relations. UN HAVRE DE PAIX est son premier long-métrage, primé aux festivals de Locarno et Jérusalem. Il développe actuellement son deuxième long-métrage, DECOMPRESSION, dont le scénario a remporté le premier prix du Sam Spiegel Lab et été développé dans le cadre de l’Atelier du Festival de Cannes.