Le Film du Mois de Mars 2020 : "DES HOMMES"
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Le film du mois de Mars se passe à deux pas chez nous de l’autre du mur des Baumettes : une prison célèbre pour son délabrement. En 2012, une visite du contrôleur général des lieux de privation de liberté déclare les conditions de détention "indignes". "L’ensemble des locaux de la détention est dans un état général de dégradation, que n’explique pas leur seule vétusté, auquel s’ajoute une saleté exceptionnelle", notait le rapport.
Bande Annonce : http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19587383&cfilm=273662.html
Genre : Documentaire français – Durée : 83 minutes - Réalisateurs : Alice Odiot & Jean-Robert Viallet - Sortie : 19 février 2020.
Synopsis : 25 jours en immersion dans la prison des Baumettes. 30 000 mètres carrés et 2 000 détenus dont la moitié n’a pas 30 ans. Une prison qui raconte les destins brisés, les espoirs, la violence, la justice et les injustices de la vie. C’est une histoire avec ses cris et ses silences, un concentré d’humanité, leurs yeux dans les nôtres.
Tentative de critique : Des murs gris et blancs encadrent une porte vitrée sale, taguée sur la droite. Un homme, visage juvénile, t-shirt griffé Nike, piétine derrière la vitre, une cigarette éteinte à la main. La musique s’élève, oppressante. Quand un surveillant s’approche, le jeune homme lui demande du feu. Peu avant, il s’était décalé, laissant apparaître derrière lui un pictogramme "interdit de fumer". Ces images ont été filmées dans la prison des Baumettes à Marseille, dans le bâtiment historique qui a fermé depuis. Le documentaire Des hommes raconte le quotidien de ses détenus : un constat dramatique à l’origine de ce documentaire, signé des journalistes et réalisateurs Alice Odiot et Jean-Robert Viallet, tous deux lauréats du prix Albert Londres. Ils font une demande de tournage qu’ils obtiennent quelques années plus tard. Les réalisateurs filment pendant vingt-cinq jours dans cette prison historique : ses murs écaillés, ses cellules étroites qu’il faut partager, le carrelage défoncé par endroits, sa cour de promenade qu’on voit au travers d’une fenêtre, avec sur les barbelés des morceaux de tissu lacérés. "Elle est en train de s’effriter la prison", lance un détenu. "Comme un morceau de shit", rigole un autre. Entre ces murs, il y a des prisonniers, souvent très jeunes et récidivistes. Le film, dépouillé de tout commentaire, les place au centre. Des hommes laisse à voir des instants de vie. Des rendez-vous avec le personnel pénitentiaire, une audience, une partie de carte. Au milieu, il y a l’ennui. Les scènes s’étirent : un détenu fume en écoutant de la musique, un autre regarde par sa fenêtre obstruée de barreaux blancs. L’image laisse vivre, sans avoir peur des silences. "Quand on cherche dans les détails, dans les recoins et dans les petits moments de relations humaines, on voit que l’humanité peut resurgir", analyse Jean-Robert Viallet. Les personnages ne sont pas juste filmés, ils s’emparent de la caméra, racontent directement au spectateur leurs histoires, leurs espoirs, leurs états d’âme. Sans chercher à être exhaustif, ce documentaire raconte le milieu carcéral à travers les yeux de ceux qui le vivent. Abandon, insalubrité, lynchages, résignation : la violence est peu montrée mais décrite. Elle n’en est que plus criante.
"Parfois les Baumettes constituent un cadre pour eux. Ils y vont, ils reviennent. Et quand la prison commence à devenir un cadre pour la jeunesse, ça interroge, c’est problématique." Alice Odiot