Visages Villages, le film de l’été
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Visages Villages, réalisé par Agnès Varda
Durée 89 mn
Sortie le 28 juin 2017
Synopsis : Agnès Varda et JR ont des points communs : passion et questionnement sur les images en général et plus précisément sur les lieux et les dispositifs pour les montrer, les partager, les exposer. Agnès a choisi le cinéma. JR a choisi de créer des galeries de photographies en plein air. Quand Agnès et JR se sont rencontrés en 2015, ils ont aussitôt eu envie de travailler ensemble, tourner un film en France, loin des villes, en voyage avec le camion photographique (et magique) de JR. Hasard des rencontres ou projets préparés, ils sont allés vers les autres, les ont écoutés, photographiés et parfois affichés. Le film raconte aussi l’histoire de leur amitié qui a grandi au cours du tournage, entre surprises et taquineries, en se riant des différences.
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S’il y a bien un film qu’il faut courir voir cet été et même revoir, c’est bien le petit dernier d’Agnès Varda qu’elle a réalisé avec JR, vous savez, ce drôle d’olibrius qui avait habillé les murs du quartier de la Belle de Mai de portraits géants de ses habitants, tout comme d’autres murs plus sinistres comme celui qui sépare Israël de la Palestine.
VISAGES VILLAGES, ce sont des habitants de tous les coins de France qui auraient pu être vous ou moi... sur une musique originale de Matthieu Chedid (M). Et ce sont deux drôles de personnages parmi lesquels on reconnaît immédiatement la silhouette particulière d’Agnès Varda, petite femme au talent et à l’humanité inversement proportionnels à la taille, qui paraît encore plus minuscule qu’à l’accoutumée aux côtés de cette asperge de JR. Agnès, ses sourires émouvants, et ce vaurien de JR qui n’arrête pas de l’asticoter. Comme si le plus grand respect qu’on pouvait témoigner aux « vieilles dames » était de rester insolent, de ne pas s’apitoyer sur les fragilités d’un corps désormais inadapté aux frasques d’un esprit pétillant, indomptable. Madame Varda, il y a plus de jeunesse, d’énergie et de rébellion sous votre frange bicolore que dans n’importe quelle boîte de nuit branchée !
Et voilà notre glaneuse et notre baroudeur, improbable équipage, embarqués dans une camionnette-photomaton à l’œil gourmand, prêts à croquer tous les passants. On ne se lasse pas de leurs échanges pleins d’humour, de candeur, dans lesquels ils se renvoient la balle tendrement, jouant avec les idées, les images, les mots. On se régale de leur capacité d’émerveillement communicative, de leur curiosité insatiable pour les autres. En quelques portraits, Agnès et JR donnent une voix aux « masses silencieuses », magnifiant ces anonymes, agrandissant leurs photos comme pour signifier leur importance, leur redonner la fierté d’être ce qu’ils sont.
C’est un hymne aux simples mortels, aux ignorés du CAC 40, aux oubliées de la grande Histoire. À ceux qui œuvrent silencieusement, aux ouvriers, aux paysans, aux héros de l’ombre, aux ombres de leurs ombres, leurs invisibles compagnes : femmes de dockers, de mineurs, fermières, serveuses… C’est un incroyable carillonneur qui virevolte parmi ses cloches. C’est Jeannine si touchante qui se revoit petite fille en train de guetter le « pain d’alouette » que son père ramenait du coron. C’est Patricia l’éleveuse qui résiste à la mode d’écorner les chèvres pour les empêcher de se battre. C’est Jackie le facteur heureux des liens tissés au fil de ses tournées, ou encore cet ingénieur fier de se sentir utile en travaillant dans une usine classée à risques… Tant de visages restés obscurs ou devenus illustres qui seront engloutis un jour par le temps, le vent et les marées.
Le mot de la fin, on le laisse Pony, un des "héros" du film, artiste méconnu et haut en couleurs : « Je suis né à l’ombre d’une étoile. Ma mère la lune m’a donné sa fraîcheur. Mon père le soleil, sa chaleur. Et l’univers pour y habiter. Tu te rends compte ? C’est quand même une grande place, que j’ai dans la vie ! »