Retraites : La lutte continue ! L’intersyndicale tient bon !
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Encore une très belle manifestation hier à Marseille !
Et pour ATTAC Aix et ATTAC Marseille, encore un beau succès pour les chorégraphies des Rosies pour lesquelles nous avons été rejointes par nombre de manifestants et manifestantes, le temps d’une chanson ou un peu plus !
Une vidéo prise sur le Vieux Port et montée par Véronique (merci à elle) ci-dessous.
Qu’en est-il de l’espoir de gagner ? Il est toujours là !
Une nouvelle journée de mobilisation est prévue le 13 avril.
Beaucoup d’enjeux sont entre les mains du Conseil Constitutionnel qui rendra ses décisions le 14 avril.
– L’une sur la conformité du texte de loi avec la Constitution
– L’autre sur l’acceptation de la question proposée pour un Référendum d’Initiative Parlementaire (sur l’âge à partir duquel on a le droit de partir à la retraite).
A propos de la conformité ou non à la Constitution, voici la Tribune signée et publiée par 66 enseignant.e.s-chercheur.e.s en droit social :
Les habits inconstitutionnels d’une réforme Ou comment faire passer le bouleversement des principes fondamentaux du droit des retraites pour une rectification des comptes de l’année 2023
Le 23 juillet 2008, une réforme constitutionnelle majeure a voulu remédier, au moins en partie, à la critique lancinante du déséquilibre de nos institutions. Elle n’a pas empêché que la très impopulaire loi sur les retraites soit adoptée d’un coup de menton présidentiel, sans majorité parlementaire ni soutien populaire. À observer ce résultat, on pourrait penser que la modification de la Constitution en 2008 fut vaine. Il n’en est rien. Nous avons assisté non pas à son échec, mais à sa violation, laquelle devrait être bientôt sanctionnée par le Conseil constitutionnel.
Depuis 2008, l’article 49 alinéa 3 ne peut plus être utilisé que pour les « projets de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale » et une fois par session parlementaire pour les autres textes. Depuis 2008, une procédure parlementaire accélérée est réservée aux « lois de financement de la sécurité sociale » (art. 47.1), afin que les objectifs de dépenses de l’année soient votés à temps. Si l’article 49 alinéa 3 a pu être utilisé à propos de la loi sur les retraites et si le débat parlementaire a pu être à ce point tronqué, c’est seulement parce que la loi sur les retraites s’intitule « loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 ». Or ce titre est un faux-semblant.
L’article 34 de la Constitution définit « les lois de financement de la sécurité sociale » : elles « déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses ». Le même article 34 fixe le domaine de la loi ordinaire : elle « détermine les principes fondamentaux (…) de la sécurité sociale ». La distinction entre loi ordinaire et loi de financement est une distinction entre questions financières de l’année et principes fondamentaux. La distinction n’est pas toujours facile. Mais en l’occurrence, elle l’est. Il apparaît clairement à tous, y compris au Gouvernement, que l’actuel projet traite des principes fondamentaux du droit des retraites : il modifie l’âge de la retraite, supprime les régimes spéciaux, prévoit des dispositions qui ne seront applicables qu’à partir de 2030, vise à protéger les générations futures… Il n’est pas une simple loi de financement pour 2023.
Et ce d’autant moins que la loi est une loi rectificative pour 2023. Prévue pour ne s’appliquer qu’à partir de septembre, elle n’a qu’un gros trimestre d’application sur l’année budgétaire qui soi-disant fait son objet. Pour la branche vieillesse, la loi de financement initiale prévoyait un déficit de 3,6 milliards d’euros en 2023. La loi rectificative prévoit, elle, un déficit de 3,8 milliards en 2023, soit une différence de 200 millions d’euros. La différence, pour un volume total qui prévoit plus de 270 milliards de dépenses est infime. Elle est du millième, aussi petite qu’un millimètre l’est par rapport à un mètre. Elle est dans l’épaisseur du trait. Chacun voit à l’évidence que l’objet de la réforme actuelle n’est pas de porter la loupe sur ce millimètre. La loi a été pensée et écrite pour les décennies à venir.
De plus, les lois de financement de la sécurité sociale n’établissent que des objectifs de dépenses. Ce qui est tout à fait différent des lois de finances qui votent des autorisations de dépenses, autrement dit des limites de dépenses. Or la modification d’un simple « objectif » est forcément moins utile que la modification d’une limite. Aussi, le recours aux lois de financement rectificatives de la sécurité sociale est très rare. Il n’y a eu que deux précédents depuis 1996. Même la forte augmentation des dépenses de sécurité sociale pour faire face à l’épidémie de Covid en 2020 n’a pas conduit à adopter de loi rectificative. Le plafond d’emprunt a été porté de 39 milliards à 95 milliards. Ce bouleversement a été rendu possible par simples décrets, qui furent ratifiés par la loi de financement suivante, celle pour 2021. Il apparaît difficile de croire que, pour la réforme des retraites, l’évolution budgétaire de la branche vieillesse de la sécurité sociale en 2023 était un aspect central de la réforme. Ce n’est même pas un objet périphérique. Ce n’est même pas un objet anecdotique. C’est juste une manœuvre grossière.
C’est aussi une manœuvre inédite. Toutes les autres réformes du droit des retraites furent des lois ordinaires, normalement débattues.
C’est enfin une manœuvre inquiétante. Si le Conseil constitutionnel juge que tout effet financier suffit à légitimer le recours à des lois de financement, toutes les réformes relatives à la sécurité sociale pourront désormais passer par les lois de financement rectificatives, car toutes ont des effets financiers. Tout l’avenir de notre système de protection sociale pourra désormais être soumis à la procédure accélérée de l’article 47-1 et à l’article 49 al. 3 de la Constitution. Il n’y aura plus en la matière de lois normales que par accident, ou par volonté spécialement laxiste de l’exécutif. La réforme de 2008, qui visait à faire de l’article 49 al. 3 une exception, serait ici réduite à un chiffon de papier.
En réalité, la réforme des retraites n’est pas une loi de financement rectificative pour 2023. Elle vise à modifier fondamentalement le droit des retraites, non à bricoler l’équilibre financier de la fin 2023. Elle use d’une procédure accélérée, pensée pour permettre un temps annuel d’information, d’évaluation et de débat public sur la protection sociale et son financement. Elle use d’une procédure dont l’objet est limité, pour respecter la démocratie parlementaire et la démocratie sociale. Ce n’est pas une loi de financement rectificative pour l’année qui peut modifier les fondamentaux de notre contrat social pour des décennies.
Pour des motifs de procédure bien moins graves, le Conseil constitutionnel a invalidé l’ensemble d’une loi sur le logement en 2012 (Décision n°2012-655 DC du 24 octobre 2012). Il lui appartient aujourd’hui de dire que les procédures démocratiques complètes sont faites pour discuter des principes fondamentaux. Il lui appartient aujourd’hui de dire que cette crise de la réforme des retraites n’est pas produite par le déséquilibre de notre Constitution, mais par sa violation.
Laure Camaji, Maîtresse de conférences HDR, Université Lumière Lyon 2
Emmanuel Dockès, Professeur, Université Lumière Lyon 2
Romain Marié, Professeur, Université Lumière Lyon 2
Maryse Badel, Professeure, Université de Bordeaux
Lucas Bento de Carvalho, Professeur, Université de Montpellier
Alexandre Charbonneau, Maître de conférences, université de Bordeaux
Pierre-Emmanuel Berthier, Maître de conférences HDR, Université Lumière Lyon 2
Vincent Bonnin, Maître de conférences HDR, Université de Poitiers
Michel Borgetto, Professeur émérite de l’Université Paris Panthéon-Assas
Alain Bouilloux, Maître de conférences, Université Lumière Lyon 2
Stéphane Brissy, Maître de conférences, Nantes Université
Pascal Caillaud, Chargé de recherche CNRS, Nantes Université
Konstantina Chatzilaou, Maîtresse de conférences, Cergy-Paris Université
Florence Debord, Professeure, Université Lumière Lyon 2
Marion Del Sol, Professeure, Université Rennes 1
Josépha Dirringer, Maîtresse de conférences HDR, Université Rennes 1
Augustin Emane, Maître de conférences, Nantes Université
Rafael Encinas de Munagorri, Professeur, Nantes Université
Ylias Ferkane, Maître de conférences, Université Paris-Nanterre
Nathalie Ferré, Professeure, Université Sorbonne Paris Nord
Florence Fouvet, Professeure, Université de Saint-Etienne
Serge Frossard, Maître de conférences HDR, Université Lyon 3
Anne-Sophie Ginon, Professeure, Université Côte d’Azur
Carole Giraudet, Maîtresse de conférences, Université Lumière Lyon 2
Linxin He, Maître de conférences, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Franck Héas, Professeur, Nantes Université
Francis Kessler, Maître de conférences HDR, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Farida Khodri, Maîtresse de conférences, Université de Saint-Etienne
Marguerite Kocher, Maîtresse de conférences, Université de Lorraine
Robert Lafore, Professeur émérite de Sciences po Bordeaux
Emmanuelle Lafuma, Maîtresse de conférences, Université Sorbonne Paris Nord
Coralie Larrazet, Docteure en droit, ATER à l’Université de Rennes 1
Loïc Lerouge, Directeur de recherche CNRS, Université de Bordeaux
Yann Leroy, Professeur, Université de Lorraine
Benoît Lopez, Maître de conférences, Université Paris Saclay
Arnaud Lucchini, chercheur à l’École de droit social de Montpellier
Sandrine Maillard, Maîtresse de conférences, Université Paris-Saclay
Emmanuelle Mazuyer, directrice de recherche au CNRS, Université Lumière Lyon 2
Kristel Meiffret-Delsanto, Maîtresse de conférences, Université de Lorraine
Frédérique Michea, Maîtresse de conférences, Université Rennes 1
Michel Miné, Professeur, CNAM
Nicolas Moizard, Professeur, Université de Strasbourg
Luc De Montvalon, Maître de conférences, Institut National Universitaire Champollion
Benjamin Moron-Puech Professeur en droit privé, Université Lumière Lyon 2
Sophie Nadal, Professeure, Cergy-Paris Université
Cécile Nicod, Maîtresse de conférences, Université Lumière Lyon 2
Isabel Odoul-Asorey, Maîtresse de conférences, Université Paris-Nanterre
Barbara Palli, Maîtresse de conférences, Université de Lorraine
Jean-François Paulin, Maître de conférences, Université Claude Bernard Lyon 1
Benoit Petit, Maître de conférences, Université Versailles Saint-Quentin en Yvelines
Marie Peyronnet, Maîtresse de conférences, Université de Bordeaux
Geneviève Pignarre, Professeure émérite de l’Université de Chambéry
Ismael Omarjee, Professeur, Université Paris-Nanterre
Elsa Peskine, Professeure, Université Paris-Nanterre
Sophie Rozez, Maîtresse de conférences, Université Paris-Nanterre
Morgan Sweeney, Maître de conférences HDR, Université Paris-Dauphine
Thierry Tauran, Maître de conférences HDR, Université de Lorraine
Lou Thomas, Chercheur à l’Université de Strasbourg
Sébastien Tournaux, Professeur, Université de Bordeaux
Jean-Philippe Tricoit, Maître de conférences HDR, Université de Lille
Isabelle Vacarie, Professeure émérite de l’Université Paris-Nanterre
Marc Véricel, Professeur émérite de l’Université de Saint-Étienne
Stéphane Vernac, Professeur, Université de Saint-Étienne
Pierre-Yves Verkindt, Professeur émérite de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Laurent Willocx, Chercheur contractuel au Comptrasec, Université de Bordeaux
Cyril Wolmark, Professeur, Université Paris-Nanterre