La Première Gorgée de Bière

Oui je sais, Philippe Delerm, le père de Vincent le chanteur, a déjà écrit une nouvelle portant le même nom mais quoi, un bon demi à la pression tiré du fût, ça vous dit rien en ces temps d’ersatz de houblon acheté en pack au supermarché du coin ?

Une bonne bière d’abbaye servie au comptoir avec des poteaux de boulot, j’en ai rêvé cette nuit, un rêve en noir et blanc comme dans un film de Marcel Carné du genre La Belle Équipe, où je me retrouvais au rade du coin sur le triage de Miramas avec d’autres cheminots, affublés de nos bleus de travail plein de cambouis et de nos agrès de protection (casque et gants), le drapeau rouge destiné à commander à la manœuvre dans nos mains, tous ensemble pareils et différents à la fois.

Réjouissant de voir comment l’inconscient recycle à sa façon les préoccupations du temps de veille : gants, drapeau rouge, camarades de travail, et le plus fort c’est qu’un des métiers du triage s’appelle « l’enrayage » et les cheminots qui s’en chargent se nomment « les enrayeurs » tout comme actuellement on tente d’enrayer l’épidémie qui nous conduit à vivre séparés.

Le rêve montre un gros plan sur une assiette de cacahuètes et d’olives posée nonchalamment sur le zinc par Dolly (sic !), ainsi nommée par nous dans ce rêve de nuit du premier premier mai confiné, Dolly la patronne du bistrot et la mascotte des cheminots du coin.

Un rêve de rire et de fraternité, où chacun plongeait franchement la main dans la dite assiette sans aucune distanciation ni gestes barrières.

Sigmund le vieux barbu cher à mon coeur prétendait que les rêves constituaient la satisfaction d’un désir refoulé, en tout cas en ce qui me concerne, ce rêve m’aura comblé le temps d’un songe.

Hervé Thomas.

Et pour chanter les Travailleurs du Rail, écoutez "les Cheminots de Sainte-Marthe" par Gari Grèu : https://www.youtube.com/watch?v=ypAFlxww_b0