Peur
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Peur
Bien sûr que l’on a peur. Peur d’être touché, de perdre ses êtres chers, peur du lendemain, du tri des patients, peur de tomber, d’étouffer, de manquer, peur de perdre son travail ou sa tête ou sa vie, peur de l’avenir, peur de sa peur aussi. Cette peur ancestrale de l’inconnu, cette peur viscérale du danger, cette peur sidérante et désarçonnante dans une société de protection, cette peur exponentielle à mesure de la compréhension de l’ampleur du désastre, cette peur qui tétanise et crée à tort la torpeur. L’angoisse pourrait infuser, la panique se diffuser, les représentations inquiétantes du réel l’emporter sur le réel. Et l’on cherche des coupables comme jadis les empoisonneurs de fontaines, on stigmatise le patient zéro, sorciérise les chauves-souris, en appelle à la colère divine et au grand complot. Puis, lentement, on apprend à concilier peur et élan de vie, inquiétude et confiance, on partage les faits plutôt que la peur, les petites actions plutôt que la paralysie, on éviter les faiseurs de peur en régulant la sienne, on rejette le danger du tous contre tous, on apprend à vivre avec le risque, à trouver la bonne distance entre effroi et bravoure, panique et self-contrôle. Allez ! Va, peur et dissipe-toi !
José Rose.