Montagne d’or : Nordgold réclame 4 milliards d’euros à la France devant un tribunal arbitral
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Un article de Paul Bocquet
"L’or est le plus inaltérable des métaux, et lui-même altère tout."
Michael Girardi, Les réflexions et pensées diverses (1784)
Le projet de la « Montagne d’or » consiste en réalité à créer une mine à ciel ouvert, c’est à dire une fosse de 2,5km de long, entre deux zones forestières intégrales dans le département français de Guyanne, qui permettrait de produire 6,7 tonnes d’or par an, pendant au moins douze ans.
Le ministère de l’Industrie a autorisé en 1995 la cession de la concession minière n°215 à la SARL SOTRAPMAG dont l’entreprise russe Nordgold et les deux holdings Severgroup et KN Holdings sont actuellement les bénéficiaires.
Les nations autochtones ont pris position contre le projet dès 2016 redoutant les effets de la pollution du site de plus de 8 km2 notamment par des métaux lourds et le cyanure, avec son cortège de désastres écologiques pour la faune et la flore.
Le gouvernement français qui avait trop longtemps soutenu le projet a fait volte-face au Printemps 2019 en décidant de de ne pas prolonger la concession minière.
Bien qu’ayant obtenu par une décision non définitive, l’annulation de cette décision de refus de prolongation de concession de la part des juridictions administratives françaises, les entreprises ont appliqué le principe « ceinture et bretelles ».
Elles ont donc décidé de porter l’affaire devant le tribunal d’arbitrage auprès de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international conformément aux dispositions du Traité bilatéral de protection des investissements entre la France et la Russie qui est entré en vigueur en 1991.
Les arbitrages garantissent aux "investisseurs", un “traitement juste et équitable” à leurs yeux et la “protection et la sécurité” de leurs avoirs, sans que les autres éléments de contexte soient pris en compte, tels que la santé, l’environnement et le climat.
Les entreprises demandent 4 milliards € en réparation de l’annulation d’un projet dont elles espéraient qu’il rapporterait 3 milliards d’€ à terme, mais qui n’existe pas à ce jour. Leurs investissements en études et autres démarches s’élèvent à environ 500 millions d’euros. Quant au bénéfice net escompté dans l’hypothèse d’une exploitation sur 12 années, il est plutôt estimé à 630 millions d’euros. (cf Note de Maxime Combe et Amélie Canone).
Il n’est pas certain que l’instance aille jusqu’à son terme. Le secret de la procédure permet en réalité toutes les transactions opaques possibles, comme en atteste une affaire similaire après l’abandon par Nicolas Sarkozy du projet minier de la compagnie canadienne Iamgold à Kaw en 2008.
Cet épisode vient confirmer le rôle désastreux de la jurisprudence des tribunaux d’arbitrage vis à vis des états pris dans une sorte de chantage entravant leur volonté de réglementation.
Il faut avec force faire barrage à toutes dispositions concernant les tribunaux d’arbitrage dans les traités en cours de négociations, en particulier par l’Union européenne.
Pour en savoir plus :
- Le site du Collectif Stop CETA Mercosur : https://www.collectifstoptafta.org/...
- La note de Maxime COMBES et Amélie CANONE, tous deux membres d’ATTAC et à l’origine de la création du T-lab.
https://www.collectifstoptafta.org/...